Né dans un petit village de Toscane, l’artiste Giovanni Gorini vit et travaille entre Paris et l’Yonne. Peintre et graveur formé aux Beaux-Arts de Florence, il explore depuis plusieurs décennies une abstraction poétique, nourrie d’histoire, de nature et de rencontres déterminantes. Giovanni nous livre ici le récit de son parcours, ses influences et la sensibilité qui guide son geste.

Giovanni Gorini travaillant dans son atelier dans l’Yonne.

Giovanni, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis né dans un petit village de Toscane. Diplômé d’une École d’Art et des Beaux-Arts de Florence, j’ai quitté la Toscane en 1979 pour Paris, que je partage avec l’Yonne.                                   

Comment l’art est-il rentré dans votre vie ?

Mon frère, aîné de douze ans, pratiquait le dessin et la peinture, et à l’âge de 7 ans, j’ai commencé à le suivre quand il allait peindre les collines dans la campagne toscane. Ces paysages deviendront ensuite terrain de recherche : impressionniste au départ, puis peu à peu dirigé vers des solutions formelles plus définies avec contrastes d’ombres et de lumières.

Vue de l’atelier de Giovanni Gorini.

Quel artiste êtes-vous et quelle relation entretenez-vous avec la créativité ?

Je suis un artiste optimiste et dans mes créations, j’élimine avant tout le tragique.

Quelles sont vos inspirations ?

Je pars toujours de quelque chose de réel que je modifie en fonction de ce que je pense.

Y-a-t-il des artistes qui vous ont particulièrement influencé durant votre parcours ? Si oui, lesquels et comment ?

Au départ, vers 1968, ma peinture était proche de celle des “Macchiaioli” (les impressionnistes de Toscane), puis des impressionnistes et surtout Cézanne. En 1974, j’ai découvert l’expressionnisme abstrait américain et, attiré par le gestuel de Pollock, je réalise ma première toile abstraite (Astratto n°1) pour me détacher de la peinture figurative.

Mais le vrai changement se produit en 1976 quand je découvre l’œuvre de Giuseppe Santomaso (fondateur du “Gruppo degli Otto” en 1952, les premiers abstraits italiens) que je rencontre, pour la première fois, la même année à Venise.

Pourriez-vous décrire votre processus créatif, de la conception à la réalisation d’une œuvre ?

Au départ du chemin qui conduit à la réalisation d’une œuvre, la vision. L’œil, comme le définit Merleau-Ponty dans L’œil et l’esprit, « instrument qui se meut lui-même, moyen qui s’invente ses fins, l’œil est ce qui a été ému par un certain impact du monde et le restitue au visible par les traces de la main ». La nature et le réel sont pour moi sources d’émotions et indices formels. Les formes comme construction de l’espace, l’espace comme la principale manifestation plastique de la conception de la réalité. 

Recréer la réalité avec forme, matière, couleur qui sont les sentiments de l’espace et du temps. Cette réalité recréée naît aussi grâce à un processus de sensibilité, réflexion, imagination, méditation qui trouvent l’étincelle dans les émotions de la perception visuelle de quelque chose de vu et vécu.

Toutes ces émotions sont transmises à l’esprit et l’esprit les transmet à la main, et la main les trace sur la toile ou sur le papier en les transformant en formes autonomes grâce aux moyens de l’artiste : le signe, l’espace, la matière, la couleur.

Quel est le rôle de la couleur dans votre travail artistique ?

C’est avec la couleur que j’exprime mes émotions. La couleur est émotion, est mémoire, et la proportion des formes est déterminée par la quantité de la couleur.

Comment définiriez-vous votre style, votre univers artistique ?

Poétique. La poésie joue un rôle important et inspire souvent mes tableaux.

Quel est votre dernier travail artistique ?

Je viens de terminer les tirages de cinq estampes 32 x 24 cm pour la 12ème Triennale Mondiale de l’Estampe à Chamalières qui mettra à l’honneur une grande rétrospective de l’œuvre gravée de Pierre Soulages, et deux estampes 52 x 52 cm pour le prochain Salon d’Automne à Paris.

Je travaille aussi sur une série de tableaux sur bois en relief.

Depuis votre entrée à la galerie Durst fin 2023, votre style a-t-il évolué ? Si oui, vers quelle direction allez-vous ou souhaiterez-vous aller ? 

À la Galerie Durst, j’ai découvert des artistes intéressants par leurs thématiques et techniques différentes. J’ai remarqué de très belles lithographies, une technique que je n’ai pas encore essayée mais qui m’attire beaucoup.

Y a-t-il un message ou une émotion que vous espérez transmettre à travers vos œuvres ? 

Transmettre un message, des émotions, est le rôle essentiel de l’art pour communiquer avec les spectateurs.

Ce que l’artiste suggère, le tableau le dit, le spectateur l’achève.

Que diriez-vous à une personne découvrant votre travail ?  

Ne cherchez pas à comprendre tout et tout de suite, mais laissez à la fantaisie et à l’émotion la possibilité de comprendre.

Pourriez-vous partager avec nous un ou deux moments marquants de votre parcours artistique jusqu’à présent ?  

La rencontre et les échanges avec deux poètes : Francesco Paciscopi et Dino Carlesi. Les conversations et les conseils de Giuseppe Santomaso, que ce soit dans son atelier de Venise ou de Paris, ont marqué de façon déterminante ma pensée et mon style.

La rencontre avec l’imprimeur en taille-douce Mario Boni dans son atelier de la rue Benard à Paris, où il m’a initié à la gravure en couleur et m’a transmis de précieux conseils, et son amitié.

Avez-vous des projets artistiques futurs ? Vers quoi souhaiteriez-vous évoluer ? 

Dans mes projets futurs, j’aimerais organiser une exposition des peintures sur lesquelles je travaille actuellement.

Que diriez-vous à un.e artiste qui débute aujourd’hui ? Quels conseils donneriez-vous à un jeune artiste ?  

D’avoir la connaissance de l’histoire de l’art, surtout celle du XXème siècle… et de garder l’esprit libre.